Correction du devoir type brevet sur Germinal

 

Correction du devoir type brevet sur Germinal de Zola.

 

I.        Un personnage anonyme.

1)      Le statut du narrateur dans la première phrase est externe car l’histoire est racontée à la troisième personne. Le point de vue est omniscient, le narrateur semble ignorer l’identité du personnage mais il connaît les lieux et sait que la « grande route » va de « Marchiennes » à « Montsou » et qu’elle s’étend sur dix kilomètres.  

2)      Le personnage est désigné par les termes suivants : le pronom personnel « il » et le groupe nominal « un homme ».

3)      Le personnage appartient à la classe ouvrière, on le voit à sa tenue vestimentaire : il porte une veste au « coton aminci » et « un pantalon de velours », il tient « un petit paquet noué dans un mouchoir à carreaux ». Il est écrit aussi « qu’une seule idée occupait sa tête vide d’ouvrier ».

4)      Le personnage est vulnérable et dans une situation de détresse car il parcourt seul une longue distance à pied, dans le froid et l’obscurité, « dans la plaine rase, sous la nuit sans étoiles (…) un homme suivait seul la longue route (…) », « grelottant sous le coton aminci de sa veste ». De plus, il est sans travail et sans gîte : « une seule idée occupait sa tête vide d’ouvrier sans travail et sans gîte ».  Il souffre surtout du froid et du vent glacial, « il ne put résister au besoin douloureux de se chauffer un instant les mains ».

5)      « Une seule idée occupe sa tête d’ouvrier sans travail et sans gîte, l’espoir que le froid sera moins froid au lever du jour. » Les transformations opérées nous font passer dans un système du présent, le verbe de la subordonnée doit donc être conjugué au futur de l’indicatif et non plus au conditionnel présent qui a une valeur de « futur dans le passé dans la phrase initiale.

 

II.      Un paysage hostile

 

6)      Les expressions qui renvoient au paysage dans la première phrase du texte sont : « plaine rase, nuit sans étoiles, (nuit) d’une obscurité  et d’une épaisseur d’encre, grande route, dix kilomètres de pavé coupant tout droit à travers les champs de betteraves ».

On peut relever deux expansions du nom :

·        Plaine rase : « rase » est un adjectif qualificatif dont la fonction est épithète liée au nom « plaine ».  

·        Une nuit d’une épaisseur d’encre : « d’une épaisseur d’encre » : groupe nominal prépositionnel (d’), complément du nom « nuit ».

7)      L’expression « les lanières » de vent est une métaphore, les souffrances infligées à l’homme par le vent sont comparées à des coups de fouet.

8)      L’autre métaphore qui traverse le premier paragraphe est la métaphore de la mer (il s’agit même plutôt d’une comparaison car l’outil « comme » est utilisé et la comparaison est explicite), le paysage est comparé à un paysage marin et les rafales de vent sont comparées à celle qui balaient une mer agitée : « des rafales larges comme sur une mer, glacées d’avoir balayé des lieues de marée, le pavé se déroulait avec la rectitude d’une jetée ».

9)      L’impression qui se dégage du paysage dans les deux premiers paragraphes est une impression  d’hostilité, le paysage semble s’allier aux intempéries pour se liguer contre le personnage. Il fait sombre, il fait froid et le vent le fouette. Par ailleurs, dès le début du roman, le décor est sombre et peu engageant, cela ne laisse rien présager de bon pour la suite de l’histoire.

10)  A partir de la ligne 10, le point de vue adopté est un point de vue interne, le paysage est vu à travers les yeux du personnage, on peut le voir à l’utilisation du verbe de perception : « il aperçut ».

 

III.    Une vision fantastique.

11)  Dans le quatrième paragraphe, le personnage découvre la fosse du Voreux, c’est une mine de charbon.

12)  S’il n’a pas pu identifier clairement le site minier auparavant c’est parce qu’il faisait trop sombre « devant lui, il ne voyait même pas le sol noir », « il n’avait la sensation de l’immense horizon plat que par les souffles du vent de mars ». D’autre part, « un chemin creux   s’enfonçait et tout disparut » ligne 13, « la palissade », « le mur de grosses

 

planches » et le  «  talus qui s’élevait » l’en ont également empêché. Du coup, pour le lecteur aussi le paysage apparaît progressivement (puisque nous sommes dans un point de vue interne) et ce procédé permet de ménager le suspense et de susciter la curiosité du lecteur.

13)   Cette « apparition » progressive du paysage est presque fantastique car d’une part le décor s’y prête (questions II) , et que d’autre part,  la mine est personnifiée, « c’était une masse lourde d’où se dressait la silhouette d’une cheminée d’usine », « cinq ou six lanternes tristes étaient pendues dehors », ces personnifications la rendent d’autant plus effrayante et monstrueuse.

 

DEVOIR d’ECRITURE :

  Germinal est le treizième roman de la série des Rougon Macquart d’Emile Zola, il a été publié sous la forme de feuilletons d’abord dans le journal Gil Blas, entre 1884 et 1885.  L'action se déroule dans le bassin houiller du nord de la France, lors d'une grève provoquée par la réduction des salaires. Outre les aspects techniques de l'extraction minière et les conditions de vie dans les corons, Zola y dépeint les débuts de l'organisation politique et syndicale de la classe ouvrière.

Le passage que nous nous proposons d’étudier est l’incipit du roman, il conviendra donc de se demander si ce passage répond bien à la définition de l’incipit romanesque au sens où on l’entend traditionnellement.

Dans un premier temps, nous montrerons en quoi le passage remplit toutes les fonctions d’un incipit. Puis, nous montrerons que cet incipit inscrit d’emblée le roman dans le combat mené par Zola en faveur de la lutte ouvrière et contre l’industrialisation. Enfin, nous verrons que le projet de l’écriture naturaliste s’illustre également dans ce  début de roman.

 

  Rappelons dans un premier temps que l’incipit d’un roman donne en général au lecteur certaines informations qui lui permettent « d’entrer » dans l’histoire. Il introduit les personnages, met en place le cadre spatio-temporel, l’intrigue et le ton de l’œuvre. L’incipit de Germinal de Zola remplit bien ces fonctions puisque le lecteur découvre le personnage principal du roman « un homme » dont on ne connaît pas l’identité mais dont on sait qu’il est ouvrier et qu’il se dirige vers « Montsou » par la « grande route ». Cet homme est « sans gîte et sans travail » et découvre une mine, on peut alors supposer que le personnage cherchera à travailler dans cette mine. D’autre part, le décor est « planté », le paysage est lugubre et sombre, peu accueillant et hostile au personnage, il «glissait au fond de ses poches les deux mains à la fois, des mains gourdes que les lanières du vent faisaient saigner ».  La mine qui apparaît progressivement pour le personnage, comme pour le lecteur se dévoile sous les traits d’une personne vivante, impressionnante et peu rassurante, « de cette apparition fantastique, noyée de nuit et de fumée, une seule voix montait ». Le lecteur est donc immédiatement plongé dans une atmosphère inquiétante, voire dangereuse et tous ces éléments fournis par l’incipit ne semblent pas être de bon augure pour l’avenir du personnage.

  En effet, Le roman semble d’emblée s’inscrire dans le combat mené par Zola en faveur de la classe ouvrière et contre l’industrialisation et c’est ce que nous allons montrer dans un second temps. Nous savons que Zola s’intéresse à tous les milieux de la société du Second Empire, même les plus défavorisés. Dans sa préface à l’Assommoir, septième roman des Rougon Macquart, il écrivait : «c’est un roman sur le peuple, qui ait l’odeur du peuple ». Cette volonté de ne rien cacher des conditions de vie des ouvriers au XIX ème siècle et des difficultés à échapper au déterminisme social et à l’hérédité se traduit ici à travers le choix du personnage principal, « une tête vide d’ouvrier sans travail et sans gîte », comme Gervaise Macquart, son fils Etienne Lantier est un ouvrier et connaîtra la vie difficile de l’ouvrier. Dans la lignée de l’Assommoir, Germinal est donc aussi « une oeuvre de vérité, le premier roman sur le peuple, qui ne mente pas », quitte à choquer, Zola veut lever le voile sur la dure réalité des classes défavorisées de son temps. Dès le début du roman, Etienne Lantier est malmené, il a faim et froid et n’a pas de toit ni de travail. Du coup, l’apparition de la mine pourrait être salutaire pour le personnage mais la fosse du Voreux, au contraire, est présentée comme un personnage inquiétant et monstrueux et nous pensons à la caricature de Robin qui montre la fosse comme un dragon dévorant les ouvriers mais survolée par Zola armé d’une lance et chevauchant Pégase, prêt à lancer l’attaque sur le monstre. Dans l’incipit de Germinal aussi la mine est personnifiée et « une seule voix montait » de ce personnage lugubre, « la respiration grosse et longue d’un échappement de vapeur qu’on ne voyait pas ». Ainsi, le roman s’inscrit d’emblée dans un combat contre l’industrialisation qui détruit les classes ouvrières. Signalons d’aileurs que Germinal est le roman de la révolte ouvrière et de la naissance des premières organisations syndicales du monde ouvrier.

  Enfin, en plus de s’inscrire dans un engagement politique et social, Germinal s’inscrit d’emblée dans un projet littéraire, le naturalisme. En effet,  ce mouvement littéraire de la seconde moitié du XIX ème siècle dont Zola est le chef de file, a pour principe de partir de la réalité pour la retranscrire le plus fidèlement possible dans les romans. Du coup, il n’est pas étonnant que le cadre de ce début  de roman renvoie à une réalité géographique car Marchiennes est une ville qui existe vraiment près de Lille dans le nord de la France. Montsou, à l’inverse, est une ville créée par le romancier. La réalité est donc le point de départ de la fiction chez Zola. D’ailleurs, on sait que l’auteur préparait l’écriture de ses romans en prenant des notes « sur le terrain » qu’il consignait dans ses Carnets d’Enquête. Sans doute Zola s’est-il rendu lui-même sur un site minier pour le décrire ensuite très précisément dans son roman, « c’était une masse lourde, d’où se dressait la silhouette d’une cheminée d’usine ; de rares lueurs sortaient des fenêtres encrassées, cinq ou six lanternes tristes étaient pendues dehors à des charpentes dont les bois noircis alignaient vaguement des profils de tréteaux gigantesques ». D’autre part, si la littérature selon les naturalistes, doit retranscrire la réalité, aucun milieu ne peut être laissé de côté et c’est ainsi qu’un ouvrier trouve toute sa place comme personnage principal d’un roman comme Germinal.

 

Pour conclure, nous pourrons dire que le début de Germinal remplit bien les fonctions que l’on attribue d’ordinaire à un incipit romanesque mais  il faudra ajouter que ces fonctions sont ici largement dépassées. En effet, le roman, s’inscrit d’emblé dans l’engagement de Zola dans la lutte en faveur  des classes ouvrières dont il dénonce la condition, rendue d’autant plus difficile par l’industrialisation massive au XIX ème siècle. Aussi, ce combat renvoie à une réalité sociale et en faisant de la littérature le miroir de cette réalité sociale, Zola illustre bien son projet naturaliste.


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